A l’heure de la rentrée nous nous retrouvons chez Jean-Michel pour parler de notre projet commun d’association : vous en entendrez parler plus amplement dans quelques temps… Nous en avons aussi profité pour découvrir la gamme du Domaine Philippe Delesvaux en Anjou et Coteaux du Layon, sur les derniers millésimes. A cette occasion j’ai aussi apporté un liquoreux très spécial à mes yeux, le Coteaux du Layon SGN Cuvée Noblesse 2002 du regretté Hervé Duloquet. Tour d’horizon…
La fin des vacances a malheureusement sonné pour la plupart d’entre nous. En éternel optimiste je me dis que la fin de l’été correspond aussi au retour des Soirées Dégustation, dont nombreuses sont déjà prévues pour ce mois de Septembre. Afin de ne pas perdre la main Jean-Michel nous invite chez lui en cette fin du mois d’août pour concrétiser un projet d’association dont vous entendrez parler très prochainement… Dans le même temps nous en profitons pour nous refaire les papilles après un été ensoleillé. Au programme du soir, le Domaine Philippe Delesvaux, une star incontestée d’Anjou et surtout des Coteaux du Layon. 95% de ces vins sont vendus à l’export, ces cuvées de liquoreux sont sans cesse encensées par les plus grands critiques américains, Robert Parker et Wine Spectator en tête ! Alors voyons voir… Philippe Delesvaux, parisien d’origine, s’est dirigé très vite vers le monde agricole et viticole au cours d’études d’agronomie qui l’ont emmené dans une exploitation céréalière au début des années 1980. Dès 1983 il acquiert des parcelles de vignes pour y produire quelques uns des vins liquoreux les plus concentrés que la région ait connue. Travailleur assidu à la vigne, sa philosophie est claire : le vin est né de la vigne, rien que de la vigne.
Il travaille donc en biodynamie pour transmettre à ces vins le meilleur du terroir angevin. Nous débutons la dégustation avec le seul vin rouge de la soirée à savoir l’Anjou « La Montée de l’Epine » 2011 issu à 100% de Cabernet Franc. Sa robe grenat est peu soutenue, il offre un nez au fruité très croquant et mûr. Le fruit rouge domine et est complété au fur et à mesure de touches de ronce, de poivron et de graphite. L’évolution olfactive est très élégante, les fleurs apparaissent même après quelques minutes dans le verre. La bouche se montre d’une belle souplesse après une attaque veloutée. Le fruit rouge est prédominant puis le jus de viande et le cuir apparaissent avant une finale qui gagne en allonge avec du temps dans le verre. Le terroir crayeux et la rusticité du cépage sont présents mais n’altèrent en rien la buvabilité de ce Cabernet Franc très agréable. Il devient cependant un peu entêtant à la fin.
La série des blancs fait la part belle au Chenin. Pour commencer l’Anjou « Feuille d’Or » 2011 offre un nez discret qui évolue sur le raisin blanc puis l’ananas. L’attaque en bouche est vive, avec des tons d’ananas séché très prononcés. Il manque toutefois de cohérence au palais. Ne trouvant pas l’équilibre entre d’acidité insuffisante et un volume de bouche fluet, nous ne savons pas sur quel pied danser. L’étiquette mentionne un blanc sec « tendre », personnellement j’ai un peu de mal à m’y retrouver… L’autre « blanc sec tendre » proposé est l’Anjou « Authentique » 2010. Sa robe robe or est un peu plus soutenue que le vin précédent, certainement car le vin a un an de plus, sa brillance est éclatante. Le nez de belle maturité arbore des notes de poire, de vanille et de pomme au four qui évolue sur la tarte tatin. Très agréable, il exprime en bouche des notes insistantes de caramel avec de nouveau la poire et la vanille en rétro-olfaction. L’acidité citronnée prolonge le vin dans une finale moyennement longue qui est portée par l’orange. Ce vin issu d’une parcelle de 1 ha de vignes franches de pied, non greffées, restitue le goût du chenin originel, peut être aussi grâce à des rendements ri-di-cules (6 hl/ha) ! Bien vu.
Nous passons à l’appellation Coteaux du Layon, l’appellation qui a révélé Philippe Delesvaux dans le monde entier. Le Coteaux du Layon Passerillé 2011 est un vin tout en finesse. Le nez dévoile les agrumes, le pamplemousse, le zeste d’orange avec des touches végétales subtiles (aubépine). Nous avons la chance d’accompagner ce vin avec un foie gras d’oie qui titille le palais avec une touche de poivre noir. L’ensemble est velouté et joue sur l’orange sanguine et la vanille. La matière sucrée de ce vin est excellement intégrée ; je m’attarde volontiers sur ce joli bonbon car il procure un très bel accord gastronomique.
Le Coteaux du Layon « Les Clos » 2011 est un grand vin en devenir. Sa robe pâle ne nous laisse pas soupçonner sa subtile complexité d’arômes, témoin de sa jeunesse. Grande distinction malgré un nez plutôt discret à ce stade. La bouche propose un équilibre de premier plan, sur le fruit blanc et jaune croquant (pêche blanche, mirabelle, pêche jaune). On peut très bien s’imaginer, une fois de plus, qu’il sera superbe dans quelques années. Très bel équilibre, grand potentiel.
Pour terminer la série nous avons le plaisir de toucher au célèbre Coteaux du Layon Sélection de Grains Nobles 2010, si recherché par les amateurs de vins liquoreux. Son nez encore très jeune propose une multitude d’arômes, allant de la cire d’abeille, au miel, à la vanille et aux fruits jaunes très mûrs. Son raffinement est remarquable au nez comme au palais : ce liquide divin est à la fois d’une grande souplesse et d’une grande délicatesse car il n’inonde pas le palais avec des excès de sucre malvenus. Au contraire ce toucher de bouche velouté est supporté par une acidité discrète et de bon aloi. La mirabelle se mêle au miel et à la pâte de fruits pour le grand plaisir de tous. Le vigneron démontre avec un tel vin tout son savoir-faire en matière de vins liquoreux. Il s’agit d’un grand exemple de Coteaux du Layon et une subtile fraindise qui évoluera favorablement dans les 5 à 10 ans à venir.
Il est opposé à un vin qui raconte une histoire, celle d’Hervé Duloquet, grand producteur de Coteaux du Layon SGN, disparu trop tôt il y a quelques années. Son héritage compte entre autres ce très beau Coteaux du Layon Sélection de Grains Nobles « Cuvée Noblesse » 2002, Hervé Duloquet. Ce liquoreux de 10 ans d’âge nous donne un aperçu de ce à quoi le vin précédent peut aspirer avec quelques années de garde, même si nous pensons qu’il sera encore meilleur que cette dernière SGN. Sa robe acajou brillante précède un répertoire olfactif riche et divers, avec à la fois du speculoos, de la cannelle, de la cire d’abeille, des fruits secs (raisin, abricot), du tabac et du bois noble, avec une évolution sur la confiture de figues et le caramel. La bouche se distingue par sa belle patine avec des évolutions complexes de sucre roux, de miel et de sirop d’érable. Un élan de fraîcheur au palais apparaît avec cette pointe d’eucalyptus sans pour autant trancher la matière imposante de ce liquoreux. La finale s’allonge sur des notes profondes de quinine qui révèlent toute la profondeur et la complexité du terroir de Layon. Un superbe témoignage à la mémoire de ce vigneron passionné.
Il ne me reste qu’à conclure ce commentaire en félicitant le travail de Philippe Delesvaux qui, en plus de travailler la terre avec le plus grand des respects de la Nature, propose des vins à des prix hautement compétitifs. Je ne suis juste pas convaincu par ces vins qu’il qualifie de « vins secs tendres » car j’ai du mal à m’y retrouver. En revanche son rouge « Montée de l’Épine » est très bon et ses Coteaux du Layon méritent toute leur réputation. Il faut juste connaître les bons cavistes pour les trouver !
In vino veritas