Vous ne connaissez peut-être pas Thierry Michon mais ce producteur émérite à la tête du Domaine Saint-Nicolas a produit un Fiefs Vendéens Pinot Noir Cuvée Jacques 2009 qui nous a littéralement scotchée lors d’une soirée entre amis : avant cela nous avions bien commencé grâce au Chassagne-Montrachet 1er Cru Les Champs-Gain Vieilles Vignes 2006 de François et Vincent Jouard avant de finir avec le Château Lynch-Moussas 2010, 5è Cru Classé de Pauillac.
La famille Michon conduit la vigne en Vendée depuis plus d’un demi-siècle. C’est en 1960 que Patrice Michon s’installe à Brem-sur-Mer sur quelques ares de vignes appartenant à son père. Petit à petit il achète des vignes pour augmenter son patrimoine viticole qui atteint aujourd’hui 40ha. En 1970, il s’installe à l’Ile d’Olonne et y construit un chai moderne de vinification. Rejoint en 1984 par ses deux fils, Thierry et Eric, ils vont bouleverser les habitudes vendéennes pour donner à leurs vins du Domaine Saint-Nicolas une empreinte et un label très particulier. En effet le domaine applique très tôt les préceptes de la biodynamie, dès 1993, dans l’ambition de placer ces vins singuliers sur les meilleures tables de France et du monde. On peut parler de pari fou mais à l’image des Fiefs Vendéens Cuvée Jacques 2009 du Domaine Saint-Nicolas dégustés ce soir avec Lio et Yannick, force est de constater que la famille Michon fait partie des meilleurs domaines ligériens. Le nez de ce Pinot Noir s’ouvre sur le cuir, les fruits noirs et les fruits des bois ; il respire l’harmonie et la fraîcheur levurée des vins biodynamiques. L’attaque de bouche charnue précède une matière onctueuse, fondante aux tannins mûrs, et veloutés. Les fruits rouges, le cuir, le tabac blond se fondent dans un ensemble de classe. Quoique finement perlant à l’ouverture, il s’intègre magnifiquement. La gourmandise se prolonge jusque dans une finale longue et sapide. Un vin si délicieux que chacun d’entre nous aurait jalousement voulu garder pour soi… Monsieur Michon, est-ce que vous faites des magnums !?
Auparavant nous avons eu beaucoup de mal à démarrer la soirée : un Graves blanc 2005 du Domaine de la Solitude bouchonné, un Gewurztraminer Vallée Noble 2006 de Seppi Landmann dilué et décevant. Mais c’était sans compter sur le Chassagne-Montrachet 1er Cru Les Champs-Gain Vieilles Vignes 2006 de François et Vincent Jouard. Il me reste encore quelques bouteilles de ce vin qui avait déjà fait ses preuves par la passé. Les frères Jouard exploitent ce domaine historique de Chassagne : Vincent à la vigne, François à la cave, bénéficient d’un patrimoine de vieilles vignes qui les a convaincus de cesser la revente au négoce bourguignon et donc de se spécialiser dans la production de vins blancs de noble origine. Malgré ses 10 ans d’âge sa robe jaune pâle du vin n’a pas évolué, les larmes sont grasses. Le nez est plein, riche et complexe avec des notes de beurre sucré, de fruits blancs, de pamplemousse et de minéral. Une fine touche toastée confirme l’élevage de ce vin. La bouche fait aujourd’hui place à la minéralité du terroir sans pour autant compromettre une matière chaleureuse, grasse et ronde. Cristallin en fin de bouche, il reprend de fines notes miellées et minérales en rétro-olfaction. Un vin complet, dans la fleur de l’âge.
Enfin Lionel nous propose un vin de Bordeaux classique avec le Château Lynch-Moussas 2010, 5è Cru Classé de Pauillac. Son premier nez s’avère profond mais somme toute discret et minéral. On ressent sa noble origine, sa stature de Pauillac, avec une légère évolution viandée et de fruit noir mûr. L’attaque en bouche est étonnamment gourmande, avenante et presque sucrée. Les tannins sont bien intégrés, déjà veloutés et portent un vin classique, agréable et sans aspérité. L’équilibre est là mais je ne pense pas que ce vin ne soit pas taillé pour la garde, ce qui est assez singulier pour un Cru Classé de Pauillac et qui plus est, dans un millésime de cette classe.
Ceci conclut une soirée marquée par cette nouvelle confirmation du talent de la famille Michon. A ce titre je me souviens de ma rencontre avec Mickaël, le fils de Thierry lors des Portes Ouvertes d’un caviste mulhousien il y a quelques années (voir par ailleurs). Je n’ai aucun doute qu’il suive avec brio la voie royale taillée par son père…
In vino veritas