Alors que la Bourgogne suscite un intérêt grandissant chez les amateurs des 4 coins de la planète, elle peine à produire assez de vin pour tout le monde. Après 2011 et avant 2013, 2012 est un autre millésime aux rendements inférieurs à la moyenne. Néanmoins d’après bon nombre de spécialistes, la qualité générale des jus produits sur le millésime 2012 est excellente. Avec Sébastien et Benoit, nous avons eu l’occasion de tester les premiers échantillons de vins blancs de Bourgogne 2012 lors d’une journée découverte chez le caviste Martel à Saint-Gall en Suisse.
Après plus de 2 heures dans les transports en commun, nous traversons toute la campagne helvète pour nous rendre aux confins du canton de Saint-Gall chez le caviste Martel, un des plus grands importateurs de vins en Suisse. Il est un peu plus de 16h quand nous traversons la porte de l’entrepôt principal de l’entreprise et entrons dans le monde magique des grands vins. Là, rangées sur des palettes stockées sur plusieurs niveaux, des caisses entières des plus grands vins du monde. Le lieu ne pouvait être mieux choisi pour déguster les premiers arrivages de Bourgogne sur le millésime 2012.
Nous débutons sans tarder par les vins blancs et plus particulièrement le seul Aligoté de cette dégustation à savoir un Bouzeron 2012 d’A&P de Villaine gentil, vif et équilibré sans pour autant nous faire chavirer. Nous montons doucement en gamme avec le Chablis Champs Royaux 2012 de William Fèvre encore marqué par le bois (fumé, vanillé) et une légère amertume en finale. Le changement de niveau est brutal avec le Chablis Grand Cru Les Clos 2012 de William Fèvre aux notes profondes de pierre mouillée, d’herbes et de menthe. Les agrumes s’affirment avec puissance et minéralité en bouche jusque dans une finale marquée par la brutalité du terroir. Le pamplemousse se distingue et toute la droiture de vin pur et empreint de classe laisse une belle trace !
Nous arrivons désormais au coeur de la Côte de Beaune avec le Domaine Leflaive. Mais avant tout nous nous mettons en bouche (si je puis dire) avec le Mâcon-Verzé 2012. Le Domaine Leflaive a beaucoup investi dans le Mâconnais ces dernières années, tendance confirmée avec l’acquisition de quelques parcelles supplémentaires près de Pouilly-Fuissé il y a quelques mois… Ce vin proposé exibe des notes florales, métalliques ainsi qu’un fruité mûr. La bouche se veut riche, poivrée, un poil boisée encore à ce stade mais somme toute assez longue et tendue. Ce Mâcon-Verzé prépare au Meursault 1er Cru sous le Dos d’Âne 2012 du Domaine Leflaive. Issu d’une parcelle située sur la commune voisine de Blagny, plus en altitude et tout près du célèbre 1er Cru Les Perrières, ce Meursault est encore au début de sa carrière avec un boisé toasté évident qui supporte des notes de groseilles et de petites baies rouges. La bouche est puissante mais avec beaucoup de fond. Sa jeunesse est foudroyante mais son équilibre et sa longueur sapide lui donneront beaucoup d’atouts pour la garde…
Nous poursuivons sur Meursault avec les vins de Rémi Jobard : un vigneron de caractère, peu volubile et qui fait partie de la jeune garde montante des vignerons murisaltiens. Son Meursault Les Chevalières 2012 provient d’une vigne en coteau dans le Nord de l’appellation, tout près d’Auxey-Duresses. Le nez est infusé de camomille, de miel et d’herbes fraîches, telle une tisane avant qu’une pointe de pâte de fruits ne surgisse. Sa complexité se confirme au palais (herbes, foin) même s’il est encore marqué par l’élevage et ces notes lactées. Ample mais manquant quelque peu de peps, il se finit sur des beaux amers et cette note de quinine. Le Meursault 1er Cru Le Poruzot 2012 se montre élégant, complexe et subtil, sur des nuances minérales et fumées qui s’ouvent ensuite sur le métal et les herbes fraîches. L’équilibre de bouche est superbe si bien que ce 1er cru se boit plus facilement que son homolgue à ce stade. C’est en fin de bouche que la force du terroir se distingue : de fines notes citronnées et la pierre calcaire sont frappées par les rayons du soleil. La finale puissante et sapide s’allongent longuement et démontre que ce vin de terroir sera superbe après 5 ans de garde. Bravo !
Nous faisons un rapide passage par le Puligny-Montrachet 1er Cru Les Clavoillons 2012 du Domaine Chavy. Encore lacté et enrobé dans son bel élevage (caramel, vanille), il se distingue au palais avec finesse et fraîcheur avant de gagner en puissance en fin de bouche. Ses belles notes citronnées ainsi que sa complexité naissante se développent en finale. Très bien. Mais comment résister au Corton-Charlemagne Grand Cru 2012 du Domaine Ponsot ! Il est évident que l’on entre dans une autre dimension mais aussi dans une autre gamme de prix… La complexité du nez de ce vin est déjà stupéfiante : praliné, chocolat blanc, groseille, fraise, poire, herbes grillés et j’en passe mais c’est aussi la subtilité remarquable de ce Corton-Charlemagne qui surprend. On poursuit dans les superlatifs avec une bouche à la texture gracieuse qui mêle à la fois un élevage maîtrisé et une maturité idéale du raisin. En résulte un équilibre dément qui porte cet ensemble puissant et aux multiples facettes qui se termine sur une note chaleureuse et encore légèrement boisée. Long, large et si spécial en somme, ce superbe vin a tout pour plaire !
Nous terminons cette série avec une révélation à savoir la gamme en blanc de Lucien Le Moine. Ce micro-négociant de Beaune a été créé à la fin des années 1990 par Mounir et Rotem Saouma avec l’objectif très vite avoué de produire 100 barriques de vin par an, pas plus ! Aujourd’hui le domaine s’appuie sur une base de fournisseurs stable majoritairement sur des appellations de prestige, que ce soit en 1er Cru ou en Grand Cru. Avant de passer aux choses sérieuses nous nous délectons d’un Bourgogne blanc 2012 encore marqué par un boisé léger mais aussi par des notes de houx et d’églantine. En bouche ce vin sans prétention se veut fringuant et frais avant tout. La montée en puissance est incontestable avec le Corton Grand Cru 2012, vin blanc issu d’autres climats que le célèbre « Charlemagne », c’est pourquoi ce blanc de Corton ne porte pas le nom habituel des blancs de cette colline. Mounir Saouma est un adepte des élevages longs, on le ressent de prime abord dans cet ensemble gras, puissant et rond. Flamboyant en première partie de bouche, il gagne peu à peu en douceur et en élégance. Mais ce qui nous marque tous les trois c’est la longueur et la persistance exceptionnelles de ce Grand Cru. Sa minéralité persiste, son allonge est interminable : un grand vin de terroir qui sera un coup de coeur unanime ! Même le Nuits Saint Georges 1er Cru Les Terres Blanches 2012 est au top : floral, élégant et subtil au nez, il se développe au palais avec amplitude et surtout, il se laisse boire sans aucune difficulté ! Minéral à souhait, sapide et empreint de cette fine touche brulée en finale, il nous ravit pleinement et couronne une série remarquable de vins blancs.
Nous arrivons au terme de cette allée consacrée aux Bourgognes blancs 2012 et il semble que ce millésime ait parfaitement miroité le style de chaque vigneron : par exemple Ponsot dans l’exubérance, Niellon et Leflaive dans la tradition et le classicisme. Autant dire que dans l’ensemble 2012 fut un révélateur de terroirs, dans la justesse et la précision : sans excès et avec un équilibre classique. Vous verrez d’ailleurs que dans l’ensemble, nous avons été plus enchantés par les blancs que par les rouges. A suivre dans le prochain commentaire…
In vino veritas