Le Languedoc est devenu depuis une vingtaine d’années le nouvel eldorado des vins français. Au cours de cette dégustation de la FCVF nous nous sommes baladés du Nord au Sud de cette grande région viticole et avons tenté d’appréhender les multiples appellations locales. Faugères, Saint-Chinian, Minervois, Corbières, etc. cachent des terroirs divers que nous avons pu découvrir. Avec quelques belles surprises comme le Clos des Jarres (encore ?) ou le Domaine Rimbert…
Après avoir été une des zones de production massive de vin de piètre qualité au début du siècle dernier le Languedoc est en passe, au prix de nombreux efforts qualitatifs, d’exploiter pleinement tout son potentiel. Bon nombres de terroirs composent cette vaste région, en résulte une multitude d’appellations locales. Nous en connaissaons tous certaines dont les plus célèbres : Corbières, Faugères, Minervois pour ne pas tous les citer… Mais il y en a plein d’autres, d’ailleurs de nouvelles appellations d’origines ont été créées depuis quelques années et mon petit doigt me dit que cette longue liste risque d’être allongée.
Nous nous retrouvons avec le groupe de dégustation pour cette nouvelle aventure et une série de 9 vins animée par Fabien et Sébastien. Nous débutons avec un vin blanc sec pour la mise en bouche : le Faugères blanc « l’Impertinent » 2011 du Château des Estanilles est un assemblage de 45% de Marsanne, 45% de Roussanne complété de 10% de Viognier. C’est une surprise de déguster un vin blanc sur cette appellation car ils représentent que 2% du total du vignoble de Faugères. D’une couleur jaune pâle brillant, son nez s’articule autour des fruits blancs, des fleurs blanches et de minéral mais est tout de même peu expressif. La bouche se présente plutôt grasse en attaque et provient non seulement des cépages majoritaires mais aussi des sols schisteux qui caractérisent le terroir de Faugères. Les fleurs blanches se retrouvent en bouche mais l’on ressent un manque de dynamisme et de tension en finale. Le peu d’acidité pénalise ce vin malgré un registre aromatique intéressant. Les vins du Sud, ma foi (10.20€)… IVV : 78/100.
Nous attaquons la longue série de vins rouges avec un coup de coeur et plus précisément le Saint-Chinian « Travers de Marceau » 2011 du Domaine Rimbert. Les sols de cette appellation sont eux aussi partiellement schisteux comme ceux qui où a grandi cet assemblage de Carignan (40%), Syrah (40%) et Cinsault. Jean-Marie Rimbert est un proche de la FCVF, un vigneron de caractère : son vin offre une belle palette aromatique au nez, sur les fruits noirs (cerise, mûre) avec une évolution mûre sur le litchi, le poivre et la réglisse. La vivacité et la fraîcheur aperçu d’emblée se confirment en bouche avec un beau fruit, des tannins encore présents et des notes de cacao qui supportent cette légère astringeance que lui apporte le Carignan. A 7.50€ il s’agit vraiment d’un plaisir qui offrira des accords multiples à table et entre amis ! IVV : 84/100.
Le vin suivant donne la réplique à ce beau Saint-Chinian. Ceux qui suivent régulièrement nos commentaires de dégustation ont déjà entendu parler de Vivien Hemelsdael, ce jeune et talentueux vigneron qui a crée sa petite structure en 2010 (voir ici la dégustation des vins de son domaine de 10ha lors du Salon des Vins de la FCVF l’an dernier). Le Minervois « En Vie » 2011 du Clos des Jarres est dominé par le pourpre profond avec des reflets violacés. Son nez est quelque peu réduit (en attestent des notes de dissolvant et de vernis) puis un côté plus sanguin éclate sous les effets d’un fruit rouge vif et intense (cerise, cassis) avec une pointe florale en évolution. La bouche est élégante et veloutée en attaque, les tannins doux prennent le relais avec vivacité et tonicité. L’équilibre est excellent, la finale se prolonge sur des notes minérales et un croquant qui fleure bon la fraise tagada. Assemblage de 45% de Grenache, 30% de Syrah et de 25% de Carignan ce concilie toutes les caractéristiques de ces cépages, en résulte un produit à la fois gourmand et plein de fraîcheur (10.20€). IVV : 84/100.
Le Corbières « Hector et Juliette » 2010 du Domaine Sainte Marie des Crozes provient de la plus grande appellation locale du Languedoc. Qui ne connaît pas les Corbières, région vaste et diverse qui carctérise à elle-même toute la diversité des vins languedociens ? Ce vin à dominante Grenache est complété de Carignan, de Syrah et de Cinsault. Ces très belles larmes grasses précèdent un nez discret mais complexe de fruits noirs, de garrigue et de vanille. Il évolue ensuite dans un registre plus animal, sur des notes de selle de cheval et de terre. La bouche est délicieuse et gourmande en attaque, s’en suit une dimension un peu trop riche et alcooleuse au palais dans un registre plutôt entêtant en ce moment. Le fruit à noyau et le poivre dominent la fin de bouche et accentuent cette sensation de puissance. Ce vin est néanmoins bien fait et gagnera certainement à vieillir (9.20€). IVV : 82+/100.
Je passerais sur le Pic Saint-Loup « L’Arbouse » 2011 du Mas Bruguière qui selon moi, n’avait vraiment pas sa place dans cette série. A 12.50€ la bouteille, on s’attendrait à moins d’astringeance et à une trace qui exprime tout autre chose que le vide sidéral…
En revanche le Faugères « Les Bancèls » 2010 du Domaine de Cébène, assemblage de Syrah (60%), de Grenache et de Mourvèdre est bien plus friand et facile. Il se donne au nez avec beaucoup de facilité et des arômes de cassis, de mûre, de fraise tagada complétés d’épices et de rose fanée. La bouche se distingue par sa souplesse, son velouté et des tannins plutôt doux. Problème : le vin accompagne une viande grillée en sauce et ses quelques sucres résiduels ne sont pas bienvenus. Le fumé, le fruité et le floral se mêlent néanmoins très bien et expriment toute la beauté de ce vin issus de schistes au plus haut de l’appellation (320m). A boire pour lui même (14.80€). IVV : 83+/100.
Le meilleur vin de la soirée est le Terrasses du Larzac « Caminarèm » 2010 du Mas des Chimères qui a grandi sur des sols basaltiques. Ce domaine fait son propre vin depuis 1993, travaille en bio depuis cette année, avec des vinifications sur levures indigènes et des taux de soufre très bas. Sa robe rouge grenat annonce un nez marqué tout d’abord par des notes animales et du fût, avant d’entrer dans un registre plus délicat et complexe : fruits rouges, cerise noire, mûre puis pruneau, romarin, tomate séchée (!) et enfin des notes animales de cuir qui nous font nous attarder. La bouche est fondue et suave avec une colonne vertébrale éclatante et minérale. Ce vin est droit, profond et sa finale est d’une superbe complexité. La rétro-olfaction se fait sur des notes de café avant de finir sur les fruits rouges et un jus de cerise éclatant. Ce vin est à la fois complet, cohérent et complexe. Il donne envie d’y retourner (12.40€) ! IVV : 88/100.
Il se comporte mieux que la soit disant star du soir, le Pézenas « Solen » 2008 du Domaine des Aurelles. J’avais déjà dégusté ce vin il y a plusieurs années maintenant (voir le commentaire du millésime 2004 ici) lorsqu’il était encore sous l’appellation Côteaux du Languedoc. Se vin se compose à 60% de Carignan et à 40% de Grenache et dévoile une couleur grenat peu soutenue. Le nez est marqué par des notes viandées, grillées (café, cigare, herbes grillées) et fruitées (fraise, cerise). Il annonce une certaine richesse que l’on retrouve au palais complétée d’une belle rondeur sur des tannins polis. Néanmoins il montre encore une petite pointe alcooleuse à ce moment précis et se termine sur la cerise au kirsch. L’alcool est un peu entêtant sur cette bouteille même si l’on aperçoit un élevage soigné et très long (24 à 48 mois). A regoûter sur une belle viande rouge grillée (18.20€). IVV : 83/100.
Nous terminons avec une surprise apportée par les organisateurs : le Corbières « Les Chemins » 2009 du Château La Baronne est un des vins favoris de Sébastien et de Benoit. Et il est vrai qu’à chaque fois c’est un nouveau coup de coeur ! Il s’agit d’une bien meilleure conclusion à cette dégustation qui a pu décevoir que le Muscat de Mireval du Domaine du Mas Rouge, très raccoleur certes au nez, mais qui manque cruellement d’équilibre en bouche. Bref revenons à ce très joli Corbières qui en a lui, du fruit et de la fraîcheur ! La framboise est nette, la mûre est gourmande et précède une bouche avec une matière charnue, un beau fruité sur le cassis et la mûre ainsi que beaucoup de relief. Cet éclat est essentiel à ces vins du Sud très riches qui font toute la différence sur leur aspect digeste… L’acidité est vive et prolonge ce vin dans une finale à la pointe minérale. La rétro-olfaction se fait sur le cacao intense et la cannelle. Quel bel exemple, qui plus est sur un millésime très chaud comme 2009… Super, comme d’habitude !
Merci Sébastien pour cette belle bouteille surprise, ainsi qu’à Fabien pour son animation très professionnelle ! Rendez-vous bientôt pour un thème qui réunira tous les vins de Saint-Emilion.
In vino veritas