Ca devient une tradition : les Avinturiers fêtent la fin de l’année de dégustation par une Soirée Prestige préparée par Gilles Reeb, le gardien de la cave du Restaurant Au Canon d’Or. Voici le compte-rendu de cette dégustation plaisir agrémentée par une cuisine de grande classe avec les vins suivants : Champagne 736 magnum, Jacquesson ; IGP Allobroges « Schiste » 2014, Domaine des Ardoisières ; Riesling Grand Cru Vorbourg « Clos Saint-Landelin » 1998 magnum, René Muré ; Côte-Rôtie « Blonde du Seigneur » 2012 magnum, Domaine Georges Vernay ; Bandol « La Tourtine » 2009, Domaine Tempier ; Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles 2005, Michel Schoepfer.
Encore une année se termine pour les Avinturiers avec en mémoire de grands souvenirs de dégustation dont vous trouverez les comptes-rendus sur ce site. Après avoir eu le privilège d’accueillir de grands vignerons comme Xavier Guillaume, Philippe Gard (Coume del Mas) ou encore François Chavériat (Domaine Lescure), il est temps de clôturer le chapitre 2016 avec une belle soirée de Noël avec la sélection de Gilles Reeb, dont la magnifique cave aux trésors fut récompensée en 2014 par la Revue des Vins de France.
Pas un membre ne manque à l’appel de ce soir et pour cause, le chef des lieux a mis les petits plats dans les grands. Nous débutons par un Champagne 736 en magnum de la maison Jacquesson à la robe plutôt claire et à la bulle active et plutôt rondelette ! Frais, vif et finement marqué par les fruits blancs et le citron confit au nez, il joue plutôt dans la discrétion et la rondeur. L’attaque en bouche est vive, énergique avec une droiture caractéristique, une effervesence prononcée mais avec un grand fond. L’apérule, le miel ainsi que les agrumes se mêlent dans une fin de bouche longue et minérale avec une acidité prononcée et profondément calcaire. Il ne joue pas dans la finesse mais laisse une trace intense. Composé sur la base du millésime 2008 (aux deux tiers et complété par les vins de réserve 2006 et 2007), ce Champagne provient à 53% de Chardonnay, à 29% de Pinot Noir et à 18% de Pinot Meunier. Il est élevé sur ses propres lies en fût de chêne et subit un léger dosage à la mise.
Deux vins accompagnent la succulente raviole de gambas, porc et crabe dans son bouillon exotique. Tout d’abord l’IGP Allobroges « Schiste » 2014 du Domaine des Ardoisières s’est montré sous son meilleur jour lors de cette dégustation avec en prime un accord mets-vin des plus extras. Ce vin est issu d’un vignoble en terrasse exposé au Sud et d’un assemblage de Jacquère (40%), Roussanne (30%), Malvoisie (20%) et de Mondeuse blanche (10%). Sa couleur tilleul aux reflets clairs précède un premier nez fermé aux nuances de sureau, de pomme, de baies et de végétal, avec une forte maturité de fruit sous-jacente. L’attaque est sèche, presque amère avant que ce vin à la maturité saisissante ne monte en crescendo : un gros volume de bouche est balancé par une élégance suave et veloutée qui confère une symbiose parfaite entre le raisin et son terroir schisteux. Les arômes de pêche blanche, de badiane et de végétal complètent le tableau avant que la minéralité chaleureuse du lieu ne nous accompagne dans une superbe finale bercée par l’orange confite. Quelle surprise et quel accord ! Cette bouteille nous donne tous envie de replonger dans le monde fascinant des vins de Savoie et de ce domaine que je ne peut que vous recommander…
Face à lui le Riesling Grand Cru Vorbourg « Clos Saint-Landelin » 1998 en magnum de René Muré tranche par sa robe or brillante ainsi qu’un nez plus évolué de noisette, de champignon, de coing confit avec une évolution sur l’hydrocarbure et la noix. A l’aveugle l’audience est divisée mais face à la persistance grandissante de notes pétrôlées, ça ne peut être qu’un Riesling ! La bouche est déjà patinée à ce stade mais avec une sensation de sucre résiduel bien que la contre-étiquette ne nous indique un équilibre sec. Quoi qu’il en soit le vin tapisse bien la palais, est réhaussé par la rondeur du bouillon exotique. Une fois encore, on dit Riesling, on dit Chenin… la longueur de ce vin est grande et digne d’un Grand Cru.
Après une entrée de premier choix, l’équipe de cuisine remet le couvert avec un gigot d’agneau de 7 heures à me pâmer. Cuit sur l’os, sa chair est d’une tendresse extrême. La Côte-Rôtie « Blonde du Seigneur » 2012 du Domaine Georges Vernay nous est servie en magnum. Cette adresse référence, à l’origine du renouveau du vignoble de Condrieu, n’est plus à présenter et les vins rouges du domaine proviennent également des meilleures crus de Côte-Rôtie. La Blonde du Seigneur est issue de la Côte Blonde, comme son nom l’indique, et d’un assemblage de Syrah (95%) et de Viognier. Sa robe grenat sombre précède un nez aérien de cuir, de bois léger complété par une note florale et une touche de cassis. Grande finesse animale et fumée. Ce vin sombre, très sombre, exprime des tons fumés et un jus corsé, encore jeune mais déjà irrésistible. Ses tannins élégants pourront encore s’arrondir avec le temps ; le final est long, fumé et épicé et conclut ce plaisir intense sur le gigot d’agneau. Tout en finesse, tout en nuances, j’adore !
Le Bandol « La Tourtine » 2009 du Domaine Tempier propose une robe encore plus sombre mais un ensemble plutôt réduit et peu agréable de prime abord. Ce vin aux larges épaules n’est pas encore en place : malgré une rondeur fruitée, son niveau d’alcool n’est pas encore complètement intégré. Cet assemblage de Mourvèdre (80%), de Grenache et de Cinsault fleure bon le pruneau, la réglisse et le café en bouche mais il lui manque encore cette noblesse que lui confèrera le temps. Dommage car la race et le contenu sont là, c’est sûr !
Nous terminons par une assiette de desserts colorée et un Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles 2005 de Michel Schoepfer qui est autre que le cousin de Gilles Reeb. Il est établi dans une vieille cave du 13è siècle à Eguisheim au coeur du vignoble alsacien. Il a produit ce vin à la robe or brillante et joyeuse qui nous fait voyager dans un monde exotique (ananas confit, vanille) avec des notes de caramel confit et de rose, le tout avec beaucoup d’élan et de vivacité. L’attaque en bouche joue sur le caramel et cette belle liqueur brûlée mais avec énormément de fraîcheur. La mirabelle, la poire et d’autres fruits confits se mêlent dans cet enselble suave, velouté et aérien. Un très joli vin et un domaine à suivre de près…
Gilles nous a gâtés d’un repas de grande classe avec une série de vins à la jeunesse éclatante pour la plupart. Seul la Tourtine 2009 aurait eu besoin d’un supplément d’air pour s’arrondir ; tous les autres vins ont brillamment participé à cette fête entre amateurs qui préfigure une nouvelle année riche en évènements. Merci à Gilles et Marie-Laure, merci aux Avinturiers et à très vite pour de nouvelles avintures…
In vino veritas