A l’occasion d’une grande soirée dégustation, nous avons eu le privilège de mesurer toute la splendeur de ces vins célèbres de la vallée du Rhône méridionale, en blanc et en rouge. Principaux figurants : Château de Beaucastel 2000 ; Château La Nerthe, Cuvée des Cadettes 2000 ; « La Croix de Bois » 2000 de Michel Chapoutier ; Domaine de la Solitude 2000, sans oublier en blanc un très grand Domaine du Vieux Lazaret 2000.
Nous avons l’occasion avec le club de dégustation que nous avons monté avec des amis de mon père de nous retrouver plusieurs fois par an autour d’un thème précis qui est prédéterminé par l’organisateur de la soirée. C’est bien la première fois que je vous parle de ces dégustations car elles ne rentrent pas vraiment dans le cadre des Afterping d’habitude. Mais qu’importe, ce site étant totalement dévoué à la passion du Vin, il serait stupide de ne pas rendre compte de ces beaux souvenirs. Plusieurs dégustations ont déjà été faites ces dernières années, avec entre autres une horizontale de Grands Crus de Bordeaux dans le millésime 1997, ou encore un voyage à la découverte des villages du Haut-Médoc. Ces soirées ont pour simple objectif de rassembler des amoureux du Vin autour d’une thématique commune et prennent rarement une tournure didactique, le but étant le partage, la convivialité et la découverte.
Nous commençons par les blancs. Malheureusement, ce fut un faux départ, puisque le Domaine de la Solitude blanc 2000 (35% Grenache blanc, 30% Clairette, 20% Roussanne, 15% Bourboulenc) n’était pas au rendez-vous. A vrai dire, il montrait des signes d’évolution marqués avec sa couleur jaune orangé. Il n’est pas à la fête et ses notes prononcées de noix et de pomme évoquent fortement un vin du Jura. Pierre Lancon, le propriétaire du domaine, m’avait mis en garde en me déconseillant d’ouvrir ce vin à ce stade de son évolution. Et effectivement, soit le vin suit cette courbe d’évolution si particulière des Rhône blancs, soit son heure était passée. La bouteille qui me reste répondra à cette question dans les années à venir…
Note : après trois jours de bouteille supplémentaires, le vin s’est comme métamorphosé ! Il s’est assagi et est désormais plus accessible. Sa fraîcheur a repris le dessus ; son acidité est encore très présente mais elle s’est affinée, et quoique peu complexe au palais, le tout évolue sur les fleurs blanches, l’anis et la pomme. La finale est moyennement longue avec une pointe de chaleur. Surprenant !
L’entrée en matière fut donc en demi-teinte, a priori. Par contre, je ne m’attendais pas à un Domaine du Vieux Lazaret blanc 2000 (50% Grenache blanc, 25% Clairette, 20% Bourboulenc, 5% Roussanne) aussi magnifique ! Conformément aux conseils du personnel du domaine, ce vin a été carafé une heure avant le service. La robe est flatteuse pour l’Å“il avec une couleur jaune pâle aux reflets brillants et rosés. Le jambage est plutôt épais et laisse augurer un vin gras. Le nez s’ouvre sur des arômes de fleurs blanches, de mangue, de pêche, et de miel et le tout s’avère magnifique en bouche. Le miel devient prédominant au palais ; le gras donne une sensation soyeuse et délicate. La finale est longue et grasse. L’accompagnement avec du chèvre frais au miel et gros sel se fait divinement, tout comme le carpaccio de Saint-Jacques à l’huile de noix et safran. Un très beau vin ! IVV : 92/100.
La série de rouges commence avec un Châteauneuf-du-Pape Les Grandes Serres 2000. Un vin sans intérêt, avec un nez curieux sur les herbes de Provence et une senteur de poulet de basse cour repoussante ! En bouche, le manque d’équilibre est certain et une balance amer/acide désagréable ne donne aucun attrait à ce vin. A revoir, d’autant plus que le domaine, certes en pleine vendange, a été le seul à ne montrer qu’un intérêt minime à ma demande de renseignements sur leurs vins.
Le Seigneur Beaucastel dévoile toute sa puissance et son incroyable potentiel. Il est au tout début de sa carrière, mais il est le seul de la série à dévoiler une telle complexité : tout d’abord les fruits noirs et le café, puis des notes de prune, d’herbes de Provence, de terre, de minéral. Le nez est déjà (presque) parfait ! Les tannins ne sont pas encore fondus, mais on sent une force caractéristique qui lui confère une grande profondeur et une énorme longueur. C’est assurément un colosse aux larges épaules, mais il ne devient entêtant en aucun cas. Un vin au potentiel encore énorme, mais qui procure déjà un grand plaisir. D’autant plus qu’avec le canard, il offre un mariage des plus parfaits. Compte tenu de sa puissance, il accompagne avec autant de brio les quelques fromages sélectionnés par Bernard Anthony (Cantal, Tomme de Savoie, et Saint-Nectaire). Un vin à la hauteur de sa réputation malgré une grande puissance et encore un potentiel d’évolution considérable. IVV : 95+/100.
En résumé les stars de la soirée ont tenu leur rang malgré leur jeune âge. Ils furent lancés par un étonnant Vieux Lazaret blanc 2000, ainsi qu’un Domaine de la Solitude rouge 2000 idéal. Je retiendrai en somme l’étonnante accessibilité et la générosité de la « Croix de Bois » de Michel Chapoutier, la fraîcheur et la pureté de la Cuvée des Cadettes du Château La Nerthe, ainsi que la puissance et la complexité du Château de Beaucastel. Ces vins justifient avec d’autres toute la célébrité du terroir de Châteauneuf-du-Pape et démontrent que le millésime 2000 est une année de grande maturité, surtout pour le Grenache.
Un grand merci à tous nos invités pour leur sympathie et leur convivialité, à Jean-Paul pour son cadeau et ses propos d’expert en matière de Vin, ainsi qu’à tous les vignerons ou leur représentants, en particulier Laurent Deconinck. Je me ferai un plaisir de visiter le Château de Beaucastel et tous les autres domaines précités dès que possible et je les invite vivement à laisser leurs commentaires sur cet article en bas de la page.
A bientôt sur in-vino-veritas.fr
Thomas